— Bonjour, je voudrais quatre pommés, s’il vous plaît.
— Vous avez une préférence ?
— Oui : un coin, un côté et deux intérieurs.
Voilà un dialogue fréquent dans les boulangeries de Bretagne. Enfin, de Bretagne, c’est vite dit. La cartographie précise du pommé est encore mal définie, je vais m’y atteler (si vous avez des infos, si ça se trouve dans votre coin, merci de m’aider dans un commentaire).
Il va me falloir faire un tro Breiz — tour de Bretagne —, car il n’y a aucune trace de pommé sur internet ! Pas d’histoire à raconter, pas d’inventeur célèbre…
On trouve bien un pommé breton à Rennes, mais il s’agit plutôt d’un chausson rectangulaire, circulez, rien à voir.
On trouve aussi, toujours sous le nom de pommé breton, un truc à la pâte brisée, une sorte de gâteau breton fourré aux pommes, j’en ai même trouvé dans un hypermarché près de chez moi ! Non, il y a erreur.
Il existe bien un truc qui s’en rapproche, c’est ce qu’on appelle le grillé aux pommes. Un truc de pâte feuilletée à la compote de pomme et par-dessus une grille de pâte feuilletée qui forme des losanges. C’est joli, c’est bon, globalement c’est la même chose, mais en bouche ça n’a rien à voir.
Le vrai pommé bien de chez nous
Notre pommé à nous, c’est une couche de pâte feuilletée, une grosse couche de compote de pommes, et une autre couche de pâte feuilletée. Oui, c’est du lourd. Du rustique. Pas de chichis, du truc de boulanger. Trop bon.
Le boulanger, donc, fabrique ainsi un grand rectangle, replie la pâte sur les bords pour bien enfermer la compote. Il découpe ensuite son rectangle en carrés individuels. Roule ma poule.
Ça rappelle un peu l’histoire du kouign amann. Y’a plus de gâteaux ! dit la boulangère. Deux minutes, j’vais en faire, répond le boulanger. De la pâte à pain, du beurre, du sucre, allez hop, et voilà le kouign amann inventé. Ici, c’est pareil, sauf que le boulanger avait de la pâte feuilletée et de la compote de pommes sous la main. Et que j’t’étale la pâte, et que j’te tartine ça de compote, une autre pâte par-dessus, on va pas rester s’amuser à faire des grilles, et puis quoi encore ? Quelques griffes à la lame de rasoir, il fait ça les yeux fermés, le boulanger, allez zou, au four, et voilà le travail, coupe donc 24 parts là-dedans !
Déguster le pommé
Le bord de la pâte, replié et soudé pour bien enfermer la compote, est plus épais, le feuilleté a pu exprimer toute son amplitude. Il y a donc des pommés sans bord, des pommés avec bord, et des coins. Chacun fait son choix, selon qu’il souhaite orienter cette merveille d’équilibre plutôt vers le fondant ou plutôt vers le croustillant.
Dans un cas comme dans l’autre, la dégustation est acrobatique : on croque le pommé, ce faisant on écrase un peu la chose. Pas de problème pour le morceau qu’on a en bouche, mais sur le reste, la compote a tendance à s’échapper. Vite, avant que ça tombe, on vient l’enlever d’un coup de langue en se tortillant un peu. Si on a pris la sage précaution de déguster le pommé enveloppé dans son sachet, on finit par manger un peu de papier détrempé. Et on continue ainsi cette aventure, à la fin on a plein de miettes sur les vêtements, on a encore le plaisir de les picorer une à une. Tout ça dans la rue, car le pommé, c’est d’abord de la street food !
Sinon, bien sûr, on peut ramener le pommé à la maison, éventuellement le tiédir, et le manger proprement avec couteau et fourchette, avec un tasse de thé et le petit doigt en l’air. C’est bon aussi.
La recette du pommé
La recette, c’est pas compliqué. Le tour de main, c’est autre chose. J’ai tenté mes premiers pommés — avec des pâtes feuilletées toutes faites — ça n’est pas une réussite totale, mais c’était pas trop mal.
Le pommé breton
Équipement
- Four
Ingrédients
- 2 pâtes feuilletées rectangulaires, environ 35 x 25 cm chacune
- 500 g compote de pommes
- 1 jaune d’œuf
- 2 cuillères à café Maïzena
- gelée de pomme facultatif, pour le glaçage
Instructions
- La compote doit être un peu épaisse. Dans le doute, ajoutez-y 2 cuillères à café de Maïzena ou de fécule, mélangez bien.
- Étalez la première pâte feuilletée dans une plaque à four. Calez-la contre les bords de la plaque, en relevant un peu la pâte. Calez les autres bords avec un morceau de papier alu froissé. Étalez une couche généreuse de compote de pomme.
- Posez la deuxième pâte feuilletée par-dessus (ça n'est pas facile !). Soudez les bords avec un peu d'eau.
- Badigeonnez de jaune d'œuf pour faire dorer.
- Voilà. Le résultat est un peu amateur, mais ça le fait. Entaillez bien la surface, pour faire joli mais aussi pour ménager des trous qui serviront de cheminées.
- Enfournez à 180°C pour 40 minutes à 1 heure.
- Sortez du four, laisse refroidir quelques minutes, puis badigeonnez de gelée de pomme pour faire briller.
- Une fois que votre préparation est froide, coupez-la avec précautions en 8 carrés.
Prochaine étape
Fort de cette demi-réussite (la saveur était bien là, l’aspect n’était pas parfait), je poursuivrai l’expérience :
- en faisant une pâte feuilletée maison, ça devait être meilleur
- en cuisant plus longtemps (je n’ai ici laissé que 40 minutes au four, c’était un peu juste).
Souvenir d’enfance dans le Leon .
Une jolie découverte pour moi!
Un incontournable !