Le lieu jaune est un excellent poisson, qui souffre d’une certaine confusion avec d’autres espèces.
En Bretagne, on sait apprécier les bons poissons ! Le lieu jaune en fait partie, au même titre que le turbot, la barbue, le bar, ou encore le rouget. Mais on ne boude pas non plus des poissons plus abordables comme le maquereau ou le tacaud bien frais. Bref, revenons à nos moutons… ou plutôt à notre lieu jaune !
Le lieu jaune, à ne pas confondre
Le lieu jaune (Pollachius pollachius) ne doit surtout pas être confondu avec le colin (merlu) ou le lieu noir (Pollachius virens). Pourquoi ? Parce que le lieu jaune est bien plus délicat, avec une belle chair fondante, blanche et nacrée.
Extérieurement, lieu jaune et lieu noir se ressemblent beaucoup. Le lieu jaune présente une ligne latérale nettement courbée (on le voit bien sur la photo en début d’article), alors que chez le lieu noir elle est droite.
Comment est pêché le lieu jaune ?
Il vit sur les fonds rocheux de l’Atlantique (uniquement en Europe, entre la Norvège et le nord du Portugal) où il se nourrit de petits poissons. Jeune, il vit près des côtes, puis il s’éloigne pour rejoindre des hauts-fonds, des « têtes de roches » ou des épaves à une profondeur de 100 m environ.
Il y a plusieurs façons de pêcher le lieu jaune, et autant dire que ça fait toute la différence :
- Au chalut de fond : méthode intensive, pratiquée par des bateaux hauturiers dans le Golfe de Gascogne, en mer Celtique, en Manche et en Mer du Nord. Les chalutiers partent en mer plusieurs jours. Le poisson est stocké en cale réfrigérée ou sur glace, mais sa chair souffre de la pression et du temps passé avant d’arriver sur l’étal. C’est pour cela que le lieu jaune de chalut est souvent moins recherché que celui de ligne.
- Au filet : pratiquée principalement dans les zones côtières de la Manche et de l’Atlantique, par des bateaux côtiers. Les sorties durent souvent de quelques heures à une journée, permettant une meilleure gestion de la fraîcheur du poisson. Cependant, selon la durée du séjour en mer et la façon dont les poissons sont manipulés dans les filets avant d’être remontés, la chair peut être plus ou moins marquée. Le lieu jaune pêché au filet est souvent proposé à un prix plus abordable que celui de ligne.
- À la ligne : méthode artisanale, respectueuse du poisson et de sa chair. Le poisson arrive sur l’étal bien frais, avec une texture ferme et intacte. Évidemment, ça se paye, mais la qualité est au rendez-vous ! Pour comprendre cette pêche, voyez l’excellent reportage de l’émission Littoral ou lisez les interviews de l’association Pointe de Bretagne, qui regroupe une cinquantaine de professionnels. Passionnant et impressionnant !
Il faut savoir que la France importe du lieu jaune frais pêché au chalut en provenance du Royaume-Uni et de Norvège.
Une espèce en danger
Les stocks de lieu jaune se sont considérablement réduits en Manche et en mer Celtique ces dernières années. En mer du Nord, où la pêche est intensive, les stocks sont inconnus. Dans le Golfe de Gascogne (zone qui commence à la pointe du Finistère), ils sont également en danger, mais de manière plus contrôlée.
Pour consommer de manière responsable, privilégiez :
- les poissons de grande taille (plus de 60 cm), vous n’êtes pas obligé d’acheter un poisson entier, les poissonniers proposent des darnes et des filets)
- les poissons pêchés à la ligne (le mode de pêche est en principe indiqué)

Quelles tailles trouve-t-on chez le poissonnier ?
Sur les étals, on peut trouver du lieu jaune de toutes tailles :
- Les plus petits (500 g – 1 kg) : parfaits pour être cuisinés entiers, mais vous avez compris qu’il vaut mieux éviter, pour ne pas encourager le pillage de la ressource.
- Les plus gros (jusqu’à 1,30 m pour 10 kg !) : idéaux pour lever de beaux filets ou des dos bien épais.
Comment bien préparer le lieu jaune ?
Faut-il l’écailler et enlever la peau ?

Le lieu jaune a de petites écailles. Si vous le cuisez entier au four ou en papillote, pas besoin de l’écailler. En revanche, si vous le poêlez, mieux vaut les enlever, votre filet sera plus propre. Quant à la peau, elle apporte de la saveur. Et même, elle se mange, bien qu’un peu épaisse. Si vous aimez le croustillant, laissez-la et faites-la bien griller, vous allez vous régaler !
Y a-t-il des arêtes ?
Oui, comme (presque) tous les poissons. Dans les filets, il y a une ligne d’arêtes assez grandes et peu nombreuses. Elles sont difficiles à repérer dans la chair crue, mais elles s’enlèvent facilement dans la chair cuite.
Darnes, filets, dos : quelle découpe choisir ?
- Les darnes : tranches épaisses avec l’arête centrale, parfaites pour le four ou la vapeur, une présentation un peu has been et, il faut le reconnaître, pas très jolie.
- Les filets : pièce découpée le long de l’arête centrale. Côté tête, ils sont irréguliers, une partie dos épaisse, une partie ventre plus fine. comprennent très bien pour une cuisson rapide à la poêle. Du côté de la queue, ils sont fins et symétriques, plus faciles pour une cuisson rapide à la poêle.

- Le dos : la partie la plus noble, c’est le filet côté tête débarrassé de la parie ventrale. La chair est moelleuse et épaisse, parfaite pour des cuissons douces.
Et le goût dans tout ça ?
Le lieu jaune offre une chair fine, blanche et feuilletée. On le compare souvent au cabillaud, mais il est un peu plus ferme. Par rapport au bar, il est moins iodé, mais tout aussi agréable en bouche. Ce qui le caractérise, c’est la délicatesse de son goût.
Le lieu jaune cru : mauvaise idée
On l’a essayé en sashimi (morceaux de poisson crus, nature) : c’est non. La texture est filandreuse et dure.
On l’a essayé en cevice (coupé en petits morceaux, « cuit » au jus de citron : c’est non. Le lieu jaune cru n’a pas de goût suffisamment marqué pour que ça vaille le coup.
Pour le poisson cru, choisissez plutôt la dorade, le saumon, le maquereau, la bonite ou le thon. Et voyez notre article sur les précautions à prendre pour le poisson cru.
Comment cuire le lieu jaune ?
Alors, cuit, il est vraiment excellent, notre lieu jaune. Pour la cuisson, il y a le choix :
- Entier au four : avec un filet d’huile d’olive et des herbes (25-30 min à 180°C pour 1 kg).
- À la vapeur : moelleux garanti (10-12 min pour un filet de 150 g).
- En papillote : avec des légumes et des épices (15-20 min à 180°C).
- À la poêle : pour une belle croûte dorée (selon l’épaisseur : 3-6 min côté peau à feu moyen-vif, puis 1 à 2 minutes sur l’autre face).
- Au four : idéal pour les darnes ou les filets épais (15 min à 180°C).
- À basse température : pour un moelleux incomparable (50 min au four à 55°C).

Mon avis : cuit à la poêle, sur sa peau, c’est le meilleur. Ou alors un mix : à basse température au four pour assurer le moelleux, puis un petit tour sur la peau à la poêle à feu vif pour dorer et développer les saveurs.

Avec quoi accompagner le lieu jaune ?
Les sauces qui lui vont bien
- Beurre blanc : la classique indétrônable, voir ici pour la réussir.
- Sauce citronnée : beurre fondu + citron = succès garanti.
- Sauce vierge : huile d’olive, tomate, basilic et citron pour une touche fraîche.
- Sauce curry ou safran : stop ! pas de saveurs trop marquées, vous allez masquer le goût de votre lieu jaune. Si vous aimez le poisson en sauce, choisissez plutôt le lieu noir ou le merlu, ils sont parfaits pour cela.
- Sauce à la bière : c’est une exception au point précédent. Si vous choisissez bien votre bière (très légère mais savoureuse), ça peut être une petite merveille
Les accompagnements
- Une poêlée de légumes, choisissez des saveurs légères et délicates, selon la saison : courgettes, céleri-rave poêlé en dés, endives coupées en bâtonnets (excellent !), fenouil, concombre (du concombre poêlé ? mais oui, voyez la recette), chou chinois…
- Des pommes de terre : sous toutes leurs formes
- Du riz
- Du quinoa : sa saveur douce convient parfaitement pour accompagner notre lieu jaune. Essayez notre recette de quinoa aux légumes.
